Lorsque le soleil décide de se déchaîner et d’inonder le 23 de enero d’une chaleur étouffante, il n’y a d’autre alternative que d’arrêter de parcourir le quartier et de rentrer dans une des quelques tiendas pour s’y désaltérer.
Romulo est propriétaire de son épicerie, il l’a achetée avec son frère au mois de mai 2002. « A peine quelques mois après, nous a surpris le lock-out. »
De décembre 2002 a février 2003, le pays fut paralysé. La Confédération des Travailleurs du Venezuela alliée au patronat a déclenché un arrêt de travail illimité. Le but poursuivit n’était en rien une augmentation salariale ou une revendication pour améliorer la vie des travailleurs vénézuéliens. Ces élites ont retenté ce qu’elles avaient échoué en Avril 2002 : un coup d’État, économique celui-ci, pour en finir avec le gouvernement révolutionnaire.
Pendant 3 mois, l’industrie pétrolière fut sabotée et les exportations bloquées. De la même manière que le Chili d’Allende fut sévèrement touché par la grève des camionneurs, les préjudices éprouvés par le gouvernement bolivarien s’élevèrent vite en milliards de dollars. La cible stratégique de cette grève était le Peuple des barrios . Privé de tout, le Peuple va se retourner contre celui qui leur parle d’un paradis sur terre, sans rien, il va se retourner contre Chavez. Ainsi pensèrent-ils, méprisant le Peuple qui savait où était son intérêt.
« Nous étions dans une situation très, très critique. Le lock-out nous a conduit quasiment à la faillite. Nous n’avions plus rien à vendre, absolument rien ! Seulement du café…nous avions ouvert notre commerce pour vendre uniquement du café !! Et le peuple était dans une situation de famine. »
La tentative de déstabilisation par lock-out fut un nouveau knock-out pour l’opposition ! Pour Romulo et son frère, la situation s’avérait difficile à surmonter.
« Nous n’avions plus rien. Mais grâce à la loi sur les micro-credits, nous avons obtenu très rapidement un micro-credit qui nous a permis de repartir, puis un deuxième pour que nous continuions de croître. Aujourd’hui grâce à ces crédits nous employons des personnes… »
Les banques pratiquant le micro-credit prêtent de l’argent aux plus démunis qui n’offrent aucune garantie de remboursements et qui sont totalement rejetés par les conditions traditionnelles de prêts. Ce petit pécule d’investissement leur permet de développer leur propre micro-entreprise, acheter une vache,… Du Bengladesh au Venezuela, du Vietnam au Mali, certaines études montrent que le micro crédit concerne à 70% les femmes et le taux de recouvrement est de 98%. Cela en fait un instrument efficace de lutte contre la pauvreté.
Au Venezuela, la loi sur le micro-credit oblige toutes les banques à consacrer un certain pourcentage de leur prêt au micro-credit. De plus, plusieurs banques se consacrent particulièrement à cette activité . L introduction de cet instrument dans l’économie vénézuélienne par le gouvernement bolivarien a en tout cas permis à Romulo et sa famille de ne pas tomber dans la misère.
« Face à la situation désastreuse pour le Peuple provoquée par le lock-out, le gouvernement se rendit compte qu’il fallait reprendre les cartes en main, ainsi naquit MERCAL, et je peux te dire qu aujourd hui je suis fier de participer à cette expérience »
Le réseau d’alimentation MERCAL fut créé pour ne plus uniquement dépendre de l’approvisionnement privé en produits de première nécessite. Mais comme nous le confirme Romulo, ce n’est pas seulement un réseau gouvernemental d’alimentation : « Nous sommes un MERCAL type 1, c’est à dire que nous vendons seulement certains produits, nous touchons énormément de gens, mais pour le reste il y a les MERCAL du gouvernement »
Les produits du réseau MERCAL proviennent pour partie des coopératives d’agriculteurs favorisées par la reforme agraire. Les MERCAL leur assurent donc un débouché commercial dans un secteur dominé par les grandes sociétés agro-alimentaires. La conséquence à la vente s’impose d’elle-même : « Il y a une différence de prix de 50 a 60% en moins par rapport aux marques traditionnelles, et la qualité est très bonne…Pour mon épicerie, ça m a fait augmenter des ventes, parce qu’avant il y avait des gens qui ne pouvaient venir chez moi…c était trop cher »
Comme bien souvent, c’est aux personnes du barrio que revient la promotion des mesures gouvernementales. La nouvelle de l’implantation d un MERCAL typo 1 dans l’épicerie de Romulo s’est propagée comme une traînée de poudre. Plus efficace qu’un sondage, ou qu’une analyse politique, l’adhésion à une mesure gouvernementale se mesure par la rapidité et la force avec laquelle le Peuple s’en empare.
Romulo et son frère sont un bon exemple de la vie quotidienne de commerçants bolivariens. Lock-out, Micro-credit, Mercal, entre l’Histoire contemporaine et les tentatives du gouvernement d’avancer sans oublier personnes, leur vie se colle a celles de leur barrio et du Venezuela bolivarien.
« Sans être dans aucune organisation de base, nous avons le sentiment de participer à la politique de ce pays…Le 23 de enero change, les gens proposent des solutions et trouvent des interlocuteurs . C’est incroyable, et pour ça, j appuie tout à fait mon président, Hugo Chavez…..tu sais, il faut pas croire, il y a aussi des gens de la classe moyenne comme nous qui le soutiennent !! »