Face aux problèmes de sous-alimentation dans les quartiers les plus pauvres du Venezuela, le gouvernement a développé un partenariat avec les organisations de base. Les Maisons d Alimentation sont née de cette coopération. Chaque jour, quatre ou cinq cuisinières offrent un repas équilibrés aux plus démunis.
Tôt le matin, à Catia, les buhoneros installent leurs échoppes, les livreurs apportent poissons et quartiers de viande aux épiceries. L’odeur de friture des empanadas a déjà envahi les rues, signe que le petit déjeuner est prêt ; « a la orden » comme disent les vendeurs de rues. Ce quartier populaire de Caracas commence à entrer dans son ébullition quotidienne.
La camionnette qui nous emmène dans le secteur Gramoven, plus haut dans la colline, est remplie d’étudiants qui partent acheter leur carnet de bus au quart du prix normal au Nucleo de Desarollo Endogeno implanté dans le quartier.
Les résidents du secteur Gramoven ont nommé ainsi leur lieu de vie en raison de l’implantation de l’entreprise nationale : « Farine Gramoven ». Depuis le haut de la butte où celle-ci est située, on retrouve chaque jour sa production dans les assiettes vénézuéliennes.
Dans ce quartier populaire, la misère et la faim ont fait leur œuvre, et certaines assiettes restaient, bien souvent, désespérément vides. La pauvreté a crû tout au long des années où les politiciens ne venaient ici que pour présenter une longue liste de promesses qu’ils oubliaient une fois élus.
La cantine des déshérités
Aujourd’hui, les bénévoles de la « Maison d’Alimentation Populaire » utilisent aussi la farine Gramoven. Cette cantine des pauvres est située dans une des nombreuses rues du Barrio, au pied de l’entreprise. Dans un petit local, quatre joyeuses grands-mères s’affairent à la préparation du déjeuner.
Cette Maison d’Alimentation Populaire a vu le jour il y a huit mois. Fruit de la nécessité du quartier et de l’organisation de la communauté pour y remédier, elle offre deux repas par jour aux plus déshérités. Gladys, une des cuisinières, nous en explique sa genèse : « Avant on travaillait à notre compte, puis on a monté cette Casa de Alimentacion. Pourquoi ? Premièrement pour aider ceux qui en avaient le plus besoin et deuxièmement pour la Révolution, pour aider notre Président dans sa gestion du pays ».
Jusqu ici, les cuisinières des Maisons d alimentations étaient bénévoles, mais le Président Chavez a assuré au cours de Alo Presidente de ce dimanche 26 juin que desormais, elles toucheront une bourse d Etat de 180.000 bolivars (84 US Dollars).
Chaque jour, 160 personnes bénéficient, midi et soir, des talents de cordon bleu de Gladys et de ses trois compañeras.
« Avant va savoir où ils mangeaient ! On voit ici des gens de la rue mais aussi des parents qui donnent tout ce qu’ils ont à leurs enfants et restent sans manger. Parfois, on voit aussi des enfants… » nous dit Augusta, coupant des oignons avec énergie.
Apres avoir ouvert cette cantine populaire, les quatre mamies ont parcouru le quartier à pied, rue par rue, maison par maison, pour informer ceux qui en avaient besoin de l’existence de ce système d’entraide. Petit a petit, de plus en plus de gens ont commencé à affluer.
Une odeur céleste emplit la petite cuisine. Comme je m’approche des marmites, par l’odeur alléché , Gladys m’informe du menu : « Aujourd’hui nous sommes en train de préparer du poulet, des pâtes et des bananes cuites…là on est en train de faire la sauce… »
La qualité des menus est l’objet de toutes les attentions. Les médecins cubains du Plan Barrio Adentro aident les cuisinières à élaborer des menus nutritionnels, copieux mais sains. Chaque repas est accompagné d’un verre de lait pour pallier les déficiences en calcium.
Lutte contre la faim.
Selon les chiffres de la Food and Agriculture Organisation of the United Nations (F.A.O), 17% de la population vénézuélienne souffraient de sous-alimentation fin 2002 . C’est pour endiguer cette endémie que ce type d’initiatives est née au Venezuela bolivarien. Cet exemple de la détermination des classes populaires à s’organiser pour résoudre les problèmes de leur communauté n’est pas isolé. Dans chaque quartier, dans chaque secteur, de semblables initiatives ont vu le jour. Plus de 600.000 vénézuéliens profitent de cette avancée sociale au travers de plus de 4000 maisons d alimentation. Le Président Chavez au cours de son allocution télévisée du dimanche 26 juin a annonce l ouverture de 1000 maisons d alimentation supplémentaire.
Elles sont soutenues en ce sens par les institutions gouvernementales qui leur procurent gratuitement les aliments et fournissent les bonbonnes de gaz nécessaires à la cuisson. Les Mercal, supermarchés gouvernementaux dont les produits sont vendus à un prix abordable pour tous, et le Programme d’Alimentation (ProAl), collaborent à l’essor des Maisons d’Alimentation Populaire. Assise au fond de la cuisine, Juana me montre des caisses d’aliments : « le Mercal du quartier nous apporte le lait et la viande, et les caisses de légumes que tu vois la bas, c’est par ProAl que nous les recevons. »
Dans le Venezuela bolivarien, les institutions demeurent au service de l’organisation populaire. Et le véritable contrôle et la gestion des Missions ou des initiatives comme celle des cantines populaires sont assumés par la communauté.
Lorsque Luiz Ignacio da Silva, en septembre 2004, présenta aux Nations Unies son programme « Zéro Faim », Hugo Chavez, en adhérant à cette proposition, a fait part de l’expérience vénézuélienne : « Pour en finir avec la pauvreté et la faim dans le monde, il faut donner le pouvoir aux pauvres. ».
Nos quatre cuisinières sont, chaque jour, derrière leurs fourneaux, pour témoigner de la pertinence de cette affirmation.